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Pour
les musiciens
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Avant d'aborder
la technique, il faut se souvenir que c'est avant tout la reproduction
la plus parfaite de la réalité que l'on cherche à
obtenir quand on enregistre. Les appareils ne sont que des "moyens" mis
au service
des SONS et de la MUSIQUE,
ce que
beaucoup oublient en trafiquant plus ou moins les signaux analogiques
ou maintenant
numériques.
Il faut
également savoir que les plus grands peintres, avant de réaliser
des chefs-d'œuvre et de s'affirmer dans leurs tableaux les plus connus,
ont commencé
par copier ceux de leurs prédécesseurs.
C'est
pourquoi il m'a semblé utile de recommander à ceux qui
veulent faire de bons enregistrements, des références de
disques et de DVD leur permettant d'entendre des œuvres musicales parfaitement
exécutées et enregistrées par de grands preneurs
de son, souvent très modestes quand on les rencontre.
Il s'agit
ici d'apprécier seulement la musique et la technique, en dehors
de tout intérêt commercial ou publicitaire.
*****
Jeanne d'Arc au bûcher
(Oratorio dramatique d'Arthur Honegger sur un poème
de Paul Claudel) :
DVD EDV 17 - production ARTE France, Cinétévé
et Opéra National de Montpellier avec l'Orchestre national et les chœurs de l'Opéra national de Montpellier et
d'Angers/Nantes Opéra ainsi que les solistes et les chœurs d'enfants Opéra Junior. L'enregistrement a
été fait en présence du public. C'est Sylvie Testud qui a interprété
le rôle de Jeanne et Éric
Ruf celui de frère Dominique. L'ensemble était placé
sous la direction du chef d'orchestre Alain Altinoglu.
Je prends la liberté de présenter
ce DVD en tête de la page "Pour les musiciens"
car il représente à mes yeux un évènement
dans le monde de la musique classique. D'autre part, quand j'avais
12 ans (et paraît-il une belle
voix...), j'ai eu la chance de me trouver dans la douzaine d'enfants
qui ont chanté la partition d'Honegger pour les deux représentations
de la version de "concert" qui eurent lieu en juin 1942, la première
au Palais de Chaillot sous la direction de Charles Munch et la deuxième quelques
jours plus tard à la salle Pleyel sous la direction d'Arthur Honegger. Celui-ci a d'ailleurs
signé ma partition des chœurs. Et les airs des chansons populaires
"En revenant de ces verts champs...",
"Madame nous vous remercions de vos
bonnes intentions...", "C'est
le mai, mois de mai, c'est le
joli mois de mai...", sont toujours présents dans ma tête.
Surtout quand les voix d'enfants s'élèvent seules dans le
silence à la fin de l'oratorio : "Personne, n'a un plus grand amour, que de donner
sa vie, pour ceux qu'il aime...".
C'est donc une œuvre qui a marqué ma vie mais qui,
à l'époque, a été rarement enregistrée
sur disques en raison peut-être de sa longueur (plus d'une heure)
et du nombre important des participants (orchestre, chœurs, solistes, comédiens). Il existe
deux disques "noirs" en vinyle enregistrés à Prague en quadraphonie, en octobre 1974, avec Nelly Borgeaud dans le rôle de Jeanne
et Michel Favory dans celui
de frère Dominique. Ces deux disques sont néanmoins compatibles et lisibles en stéréophonie
car peu de mélomanes possédaient le décodeur nécessaire
à la "quadraphonie" qui n'a jamais connu le succès escompté.
L'œuvre enregistrée sur ce DVD est celle
de la version scénique destinée à l'Opéra,
avec un Prologue ajouté en 1944 à la demande de Paul Claudel
pour une représentation qui devait avoir lieu à l'Opéra
de Paris et qui, en définitive, eut lieu à Bruxelles en
1946 au Palais des Beaux-Arts. Ayant peu apprécié
certaines mises en scène dites "modernes" - concernant en particulier
des opéras de Mozart - j'avais quelques craintes en commençant
à visionner ce DVD. Or, je ne peux qu'applaudir comme le public
l'a fait pendant huit minutes à la fin de cet oratorio dramatique
(acclamations que l'on a heureusement conservées). La mise en
scène est remarquable, sobre, sur fond noir avec seulement les
personnages éclairés, sauf pour quelques scènes
où Jeanne évoque son enfance. C'est du grand "Art".
Quant à Sylvie Testud, elle
incarne totalement Jeanne d'Arc, autant par sa voix que par son visage
expressif et met parfaitement en valeur le texte de Paul Claudel dans
son dialogue avec frère Dominique et dans les scènes dramatiques.
Il existe un sous-titrage pour le texte des chœurs et de certains intervenants qui permet
de bien suivre l'action.
Le son est parfait, comme d'ailleurs l'image numérique,
sans qu'il y ait prédominance de l'orchestre par rapport aux
chœurs ou aux solistes. Précisons
que la prise de son a été faite par Radio-France alors que
les moyens techniques Vidéo sont dus à AMP. L'enregistrement
a eu lieu en public le 13 juillet 2006 à l'Opéra Berlioz-Le Corum de Montpellier.
Pour terminer, précisons que c'est Arthur Honnegger qui a utilisé
le premier les "Ondes
Martenot" dans un orchestre classique et précisément
dans "Jeanne d'Arc au
bûcher". Je me souviens très bien qu'au cours de l'exécution
de juin 1942, j'avais devant moi la musicienne qui en jouait et faisait
glisser un anneau avec sa main le long d'un ruban tendu devant le clavier
de l'instrument (le groupe des petits chanteurs avait été
placé derrière l'orchestre, devant les chœurs, puisqu'il s'agissait de la version
de concert).
Un livret de 32 pages en
trois langues (Français, Anglais, Allemand) complète ce
DVD avec une Préface de Paul
Claudel (1868-1955), rédigée pour la création
française faite le 8 mai 1939 à Orléans. On trouve
aussi un précieux texte d'Arthur
Honegger (1892-1955) qu'il a intitulé "Quand j'écrivais Jeanne
au bûcher", à lire absolument avant de regarder
cette œuvre. Car la genèse
de cet oratorio ne fut pas simple. Il avait été commandité
par Ida Rubinstein en 1934, mais elle avait connu plusieurs refus ce qui
est parfaitement expliqué dans le commentaire très intéressant
de Maxime Kaprielian, directeur
de "ResMusica".
Après avoir pris connaissance du poème de Paul Claudel,
Arthur Honegger commença à composer la musique en janvier
1935 et l'œuvre ne fut terminée
qu'en décembre de la même année.
Ce DVD est à recommander sans réserve, d'autant plus qu'il est vendu à un prix très abordable (14 euros) dans une grande surface que tout le monde connaît. Cet enregistrement a été effectué en 2006 dans le cadre du Festival de Radio-France et de Montpellier, avec le concours de la région Languedoc-Roussillon et de la Fondation Aria.
Nostalgie d'une voix perdue :
Bonus du film "Farinelli"
- DVD Aventi - EDV 1284.
Remarquable documentaire de 60 minutes en "bonus" sur
le DVD du film "Farinelli". Il nous fait découvir ce
qu'étaient les "castrats" et comment le réalisateur Gérard
Corbiau (auteur avec sa femme du scénario original de Farinelli)
a réussi à obtenir la reconstitution d'une tessiture de "castrat"
avec les voix d'un "contre-ténor" (Derek Lee Ragin) et d'une
"soprano colorature" (Ewa Mallas Godlewska) grâce au travail
de l'ingénieur du son suisse Jean-Claude Gaberel et à celui
des spécialistes de l'IRCAM à Paris.
Les techniques numériques d'enregistrement ont permis
de réaliser le passage d'une voix à l'autre, sans discontinuité
de timbre, de rythme ou d'intonation. Dans le film, la voix du célèbre
castrat est donc une voix, ou plutôt deux voix naturelles, et
non une voix synthétisée comme beaucoup de spectateurs l'ont
cru (à part pour une seule note trop aiguë). Mais à
aucun moment on ne s'en rend compte et c'était la seule solution
pour retrouver toute l'étendue dans le grave et l'aigu de la voix
d'un castrat, nécessaire pour chanter les œuvres des compositeurs
de l'époque de Farinelli (né Carlo Broschi - 1705/1782), comme
par exemple son frère ou le musicien Porpora.
Le documentaire retrace tout le travail réalisé
par l'ingénieur du son, le directeur musical Christophe Rousset,
son orchestre d'instruments anciens "Les talents lyriques" et,
bien sûr, le contre-ténor et la soprano colorature. Les
premiers essais d'enregistrement ont commencé en avril 1993 avec
Jean-Claude Gaberel pour aboutir en septembre 1994 à la
voix du castrat ressuscitée, parfois reconstituée note par
note avec les voix de la soprano et du contre-ténor, finalisée
par l'IRCAM et éditée en Compact-Disc par la firme Auvidis
(K1005).
En 1995, deux "César" (Meilleur son et Meilleur
décor) ont été décernés à
ce film, ainsi que le prix du Meilleur film étranger au Golden
Globe de la même année.
Weihnachtsoratorium (Oratorio de Noël de Johann
Sebastian Bach) :
BWV 248-DVD Deutsche Grammophon 2006 - LC/0173.
Les solistes, le Tölzer Knabenchor et le
Concentus Musicus Wien sont placés sous la direction de Nikolaus
Harnoncourt. Bien que l'enregistrement ait été effectué
en juillet et novembre 1981 dans la collégiale de Waldhausen en Autriche,
la qualité sonore - 25 ans plus tard sur DVD - est excellente avec
des images d'une netteté et d'une définition étonnantes,
surtout si l'on reproduit le DVD en balayage progressif. On dit d'ailleurs
dans la notice qu'il s'agit d'un véritable document historique.
Nikolaus Harnoncourt, par sa façon de diriger
l'orchestre d'instruments anciens, le chœur et les solistes, communique
à tous son amour du baroque dans l'esprit luthérien qui
se dégage de cet "Oratorio de Noël". Au cours de l'exécution
de cette œuvre qui dure environ 2 heures et 30 minutes, il se produit
un véritable lien, une vraie communion entre le chef que l'on
voit souvent de face et les enfants du Tölzer Knabenchor. Il est
certain que Jean Sébastien Bach, qui a connu tellement
de problèmes avec ses jeunes chanteurs et musiciens il y a plus
de 250 ans, n'a jamais pu entendre son oratorio aussi parfaitement exécuté.
Que ce soit pour la qualité technique (prise de son,
cadrage, définition, montage) ou pour la perfection musicale,
ce DVD est pour moi une référence et une leçon donnée
à tous ceux qui auront un jour à filmer un concert de cette
importance.
h-Mol Messe (Messe en si mineur de Johann Sebastian
Bach ) :
BWV 232
- DVD/TDK DV-BAMBM.
Cette "Messe en si mineur" pour deux chœurs
(S,A,T,B), quatre solistes, orchestre et orgue, a été
enregistrée au cours du concert donné dans l'église
Saint-Thomas de Leipzig le 28 juillet 2000 pour le 250e anniversaire de la mort de Johann Sebastian Bach.
C'est Georg Christoph Biller, 19e successeur du Cantor de Leipzig, qui dirige aujourd'hui
les enfants et les jeunes du Thomanerchor de Leipzig. Pour ce
concert exceptionnel, les solistes, le Thomanerchor et
le Gewandhausorchester avaient été rassemblés
sur la vaste tribune de la Thomaskirche de Leipzig, magnifiquement
restaurée après la guerre.
La prise de son, malgré les difficultés, a été
parfaitement réussie de même que les prises de vue grâce
à un matériel très performant avec caméras
télécommandées.
L'exécution est remarquable et l'on s'aperçoit
très vite que chaque enfant du chœur "vit" ce qu'il chante et
se sent concerné par cette œuvre difficile, grâce à
la direction toujours aimable et souriante de Georg Christoph Biller.
C'est un grand moment d'émotion et de perfection musicale et technique.
On remarquera que le réalisateur a conservé à la
fin les applaudissements de l'assistance, parfois supprimés dans
certains DVD quand l'enregistrement est fait en "live", créant
ainsi un silence pesant pendant le défilement du générique
de fin. On perd ainsi l'ambiance et la chaleur du public qui ne s'exprime
plus. Pour les vrais mélomanes, il manque quelque chose car les
applaudissements à la fin d'une œuvre font partie du concert.
On peut éventuellement les "shunter" au bout de quelques minutes
(selon l'expression technique consacrée) s'ils durent trop longtemps,
ce qui est souvent le cas après une audition.
Disque-test (supplément au numéro
113 - mars 2006 - de la revue "Prestige Audio-Vidéo") :
Depuis les débuts de la "Haute-Fidélité",
de nombreux disques ont été offerts avec des revues pour
"tester" le matériel des passionnés. La plupart d'entre
eux étaient composés d'extraits d'oeuvres empruntées
à des enregistrements du commerce avec, bien sûr, l'autorisation
du producteur.
Ce Compact-Disc de la revue "Vidéo-Prestige" est remarquable
parce qu'il renferme des enregistrements très divers comme une
voix de femme, l'ensemble "Tango Nueve", une plage de "Blue-rock",
une guitare, un piano Steinway & Sons D de 2,74 mètres de longueur,
un Yamaha C 7, un orgue (celui de la cathédrale de Minden
en Allemagne) et même un orchestre d'instruments à vent
(celui du Conservatoire de Saint-Claude en France). À part ces
deux dernières plages qui ont évidemment été
enregistrées sur place, la prise de son des autres a été
faite au Studio Passavant par Philippe Muller et Bernard Neveu
avec la recherche d'une reproduction la plus fidèle possible par
rapport à l'audition réelle en utilisant un minimum de microphones
(la plupart du temps deux omnidirectionnels en couple). La qualité
ne trompe pas et on pourra avoir une pensée pour André
Charlin et ses premiers enregistrements de 1956 avec sa "tête
artificielle" et ses deux micros omnidirectionnels placés de
part et d'autre d'un coussin d'un vingtaine de centimètres de diamètre.
C'est un disque-test remarquable, avec des interprètes de tout premier
ordre, utile pour contrôler une installation mais aussi très
agréable à écouter. Bravo.
Le Boeuf sur le toit (de Darius Milhaud avec l'orchestre
du théâtre des Champs-Élysées dirigé par
l'auteur en 1956 - disque
Charlin SLC 17) :
Puisque nous venons de parler d'André Charlin,
précisons que ses anciens enregistrements, édités
sur vinyle dans les années soixante, sont maintenant disponibles
dans le commerce sur Compact-Disc après une reprise effectuée
en Allemagne à partir de disques pressés mais jamais lus
(les bandes originales ont en effet disparu). L'enregistrement du "Boeuf
sur le toit" a été réalisé en 1956 par
André Charlin au Théâtre des Champs-Élysées,
le disque vinyle n'étant sorti dans le commerce qu'après le
choix de la norme de gravure stéréophonique compatible (gravure
latérale 45/45), faite en 1958. Quand on écoute cet enregistrement,
on est étonné par la qualité sonore et la clarté
qui s'en dégage, permettant de situer exactement les différents
instruments dans l'espace sans être gêné par les grattements
intempestifs des anciens disques "noirs" (mis à part le très
léger bruit de fond dû à la bande magnétique
d'origine, inhérent au procédé d'enregistrement de
l'époque). C'est le secret de la prise de son en couple et ce disque
d'anthologie est indispensable à tout preneur de son.
Batalla 1 Imperial (de Joan Cabanilles, joué
par Montserrat Torrent sur les trompettes en chamade de l'orgue de Saragosse
- disque Charlin
AMS 69)
:
Comme le précédent, cet enregistrement
a été réalisée par André Charlin
avec sa tête artificielle. La clarté obtenue avec cet orgue,
que l'on peut voir devant soi en fermant les yeux tellement la place des
tuyaux dans l'espace est exacte lorsqu'ils jouent, confirme qu'il y a plus
de 45 ans on savait faire des enregistrements remarquables alors qu'aujourd'hui,
les prises de son d'orgue - souvent très difficiles - ne sont pas
toujours bonnes malgré le numérique (et peut-être à
cause de lui). Un matériel moderne et performant ne suffit pas
pour réussir un enregistrement. Il faut choisir un minimum de
micros et avoir de l'expérience pour les placer (rappelons le ballon
gonflé à l'Hélium porteur du couple des deux micros
cardioïdes de Pierre Vérany pour l'enregistrement de
l'orgue du Roi Soleil joué par Pierre Bardon en 1978 dans l'église
de Saint Maximin en Provence - disque vinyle PV 3791). Cette "Batalla
1 Imperial" sonne avec une clarté étonnante, sans aucune
distorsion ni confusion, alors qu'en raison de la réverbération,
on obtient souvent dans un grand édifice religieux un mélange
de sons directs et de sons réverbérés empêchant
de distinguer clairement les différentes parties du message musical.
Avec presque un demi-siècle de distance, les
enregistrements Charlin sortent de l'oubli grâce à
Arlette Albohair qui les possède tous et les met de nouveau
à la disposition des passionnés de MUSIQUE et de pureté
SONORE. Ils n'ont pas fini de nous étonner en nous rappelant
les vérités premières de l'Art du Preneur
de SON.
A Night of Encores : Concert de l'été 2002
à la Waldbühne de Berlin (Théâtre de verdure) avec
le violoniste Vadim Repin et le Berliner Philharmoniker sous la direction
de Mariss Jansons - DVD/TDK réf. DV-WBNOE.
C'est dans le vaste et impressionnant théâtre
de verdure de Berlin que 20 000 spectateurs ont assisté
à cette soirée exceptionnelle qui a été enregistrée
de façon remarquable par la société EuroArts,
le 23 juin 2002. De très nombreux micros avaient été
placés sur des pieds de sol et des perches devant chaque pupitre
(cordes, bois, cuivres, percussions) mais aussi devant les solistes
afin que l'on entende bien la flûte, le hautbois, la clarinette,
les harpes et même le triangle quand cela était nécessaire,
sans que les sons se perdent dans la masse orchestrale. Un micro était
suspendu au-dessus de Vadim Repin et tous les câbles aboutissaient
à une importante console de mélange.
Bien qu'enregistré en plein-air, ce DVD possède
une excellente qualité sonore et une présence du soliste
et des instruments de l'orchestre révélant la parfaite
maîtrise des ingénieurs du son ayant effectué l'enregistrement
numérique (en stéréo, dts et 5.1). Dans ce cas précis,
on ne peut pas se contenter d'un "couple" A-B, X-Y, M-S ou ORTF... !
Quant au programme, il s'agit de pièces choisies parmi
des œuvres composées par de grands musiciens comme Wienawski
(1835-1880), Tchaikovsky (1840-1893), Sibelius (1865-1957), Elgar (1857-1934),
Richard Wagner (1813-1883), Fritz Kreisler (1875-1962), Carlos Gardel
(1887-1935), Niccolò Paganini (1782-1840), Anton Dvoràk
(1841-1904) et quelques autres, le concert se terminant par la "Farandole"
de l'Arlésienne de Georges Bizet (1838-1875) et "l'Aragonaise"
du Cid de Jules Massenet (1842-1912). Comme le titre du DVD l'indique,
les morceaux du programme sont souvent joués à la fin des
concerts par les solistes et les orchestres comme "bis"
(appelés "Encores" par les anglo-saxons, indiquant
ainsi que les auditeurs en veulent... encore..., ce qui est plus logique
!).
En écoutant ce DVD, on ne peut qu'être
séduit par la virtuosité et la musicalité de Vadim
Repin au violon et la perfection d'exécution du Philharmoniker
de Berlin, perfection qui n'est plus à démontrer.
Mais l'enthousiasme des musiciens et des 20 000 spectateurs (dont beaucoup
d'enfants) n'a fait que croître au fur et à mesure
que la nuit tombait et après l'exécution du "Carnaval
de Venise" (opus 10) de Niccolò Paganini, joué
de façon exceptionnelle et humoristique avec la connivence du Chef
d'orchestre Mariss Jansons, des lumières tremblotantes se
sont allumées un peu partout parmi les spectateurs qui ont réclamé
un "bis" du "bis" à Vadim Repin. On se serait cru à
un concert de "country-music" ! Pendant l'exécution du "Wiener
Burger" (Citoyens de Vienne) qui suivait, les spectateurs n'ont pas
hésité longtemps à se balancer au rythme de la valse
et à faire un triomphe à l'orchestre et à
Mariss Jansons. Les gens étaient heureux !
On dit souvent qu'en France le peuple n'aime pas la
musique "classique". C'est en partie vrai si l'on sait qu'il est difficile
de rassembler plus d'une quarantaine de personnes pour un récital
de piano ou le concert d'un quatuor de cordes dans la France "profonde",
comme ce fut le cas pour celui que j'ai enregistré récemment
en "live" ! Mais si l'on commençait à sensibiliser
les enfants en diffusant des extraits de ce DVD dans les écoles
ou sur les chaînes de télévision à une heure
de grande écoute, les jeunes comprendraient que la musique "classique"
n'est pas triste ni ennuyeuse et qu'il faut assister à de tels
concerts pour l'aimer. Il est ensuite probable que beaucoup voudraient
apprendre à jouer d'un instrument à condition qu'on ne leur
impose pas préalablement une ou deux années de solfège
! Même s'ils ne deviennent pas eux-mêmes des interprètes
- car tout le monde ne peut pas être Vadim Repin ou Yehudi
Menuhin - ils écouteraient peut-être plus facilement par
la suite des œuvres "classiques" sans les rejeter a priori. Tout dépend du programme et des interprètes
!
Heureusement, avant le traditionnel morceau de fin
"Berliner Luft from Frau Luna" (L'air Berlinois de "Madame la
Lune"), ce sont deux œuvres de compositeurs français qui
ont terminé cette magnifique soirée. Merci. Rien n'est
donc perdu !
Pour ceux qui aiment les chœurs : Pour les temps de Noël et de
fin d'année, signalons l'excellent DVD TDK "Gloria in Excelsis Deo"
du "Thomanerchor de Leipzig", enregistré en 1995 et édité
par TDK en 2002.
Réf. DV- CHTBC.
Il s'agit de motets et de chants de Noël composés
par J.S.Bach, Palestrina, Schein, Schütz, Max Reger, Mauersberger,
Mendelssohn-Bartholdy, entrecoupés d'œuvres d'orgue des mêmes
compositeurs, jouées par Ullrich Böhme sur l'orgue
ancien restauré de la Thomaskirche de Leipzig (qui se trouve
sur la tribune) et sur l'orgue de facture moderne placé latéralement
contre un mur de la nef. Le Thomanerchor de Leipzig possède
une homogénéité et une texture sonores remarquables.
Le Cantor, Georg Christoph Biller, dirige les enfants et les jeunes
ténors et basses de ce chœur de façon toujours souriante
ce qui lui permet d'obtenir une expression vocale d'une grande sensibilité
avec beaucoup de nuances. La prise de son est parfaite.
Mais ce qui est intéressant dans ce DVD, c'est que la
partie purement musicale est complétée par un documentaire
de 29 minutes sur la vie des enfants du Thomanerchor, les répétitions
et les concerts ("Zwischen Schule und Kantate"). On pourra
faire une comparaison utile avec le documentaire de 50 minutes "Les
Petits Chanteurs à la croix de bois à chœur ouvert"
réalisé par FR3 Nord-Picardie en 1989 (édité
en cassette VHS : FR3 - Service commercial - 35 rue Léon Gambetta
- 59 130 Lambersart) et le récent documentaire de 1 heure 19 minutes
réalisé par Emmanuel Descombes, diffusé le
jeudi 21 décembre 2006 à 22 h 55 sur la deuxième
chaîne française (il sera peut-être disponible
dans l'avenir en DVD. Qui sait...?).
Le seul regret quant au DVD TDK du Thomanerchor, c'est l'absence
de sous-titrage en français, le seul disponible étant
en anglais alors que le texte du livret d'accompagnement est en trois
langues : Allemand, Anglais et Français. Il est vrai que l'Anglais
est devenu maintenant une langue internationale mais pratiquement tous
les DVD aujourd'hui sont doublés en plusieurs langues. Il faut
faire un effort étant donné le prix.
Pour ceux qui dirigent ou veulent
créer un chœur d'enfants : Précisons qu'il existe trois
films remarquables, réalisés par Philippe Reypens, cinéaste
belge renommé, qui s'est attaché à mettre en valeur
les ensembles de petits chanteurs. Production King's Group - rue des
Taxandres 21/6 - 1040 Bruxelles -
Sous le titre "L'or des anges", un DVD regroupe
les trois films, tournés entre 1998 et 2001 :
- le premier porte le titre "L'or des Anges"
et retrace l'histoire de ces formations depuis les temps les plus
anciens avec le concours du chœur anglais de la Cathédrale
de Worcester,
du "Knabenchor Hannover" dirigé par Heinz
Hennig qui l'a fondé après la dernière guerre
(il est malheureusement décédé le 29 janvier
2002 à l'âge de 75 ans), des "Wiener Sängerknaben"
dirigés par Agnes Grossmann et des "Petits Chanteurs à
la Croix de bois" dirigés à l'époque par
Rodolphe Pierrepont.
- le film suivant est un court métrage romancé,
"Un peu de fièvre", d'une très grande sensibilité,
sur les problèmes causés par la mue chez les enfants chanteurs
qui perdent leur voix de "soprano" vers l'âge de 14/15 ans.
- enfin, le dernier - Rejoice - est un
remarquable reportage sur le Festival de Poznan qui a eu lieu en 2001
dans cette belle ville de Pologne où l'on a pu voir et entendre de
nombreuses formations célèbres comme le chœur du New College
d'Oxford dirigé par Edward Higginbottom, le Nidarosdomens
Guttekor de Norvège, les St. Florian Sängerknaben
d'Autriche, les enfants d'Azuoliukas de Lituanie,
les Pueri Gaudentes tchèques, l'ensemble "Dresdner
Kapellknaben" et de nombreux autres groupes de Pologne (dont
les "Rossignols de Pologne"), du Danemark, des Pays-bas,
de Corée et des USA. Il serait trop long de les énumérer
tous mais un montage habile permet de donner un aperçu de leurs
prestations qui duraient en réalité entre 6 et 7 minutes
chacune le jour du concert de gala, avec en complément des extraits
du Messie de Haendel, du Requiem de Mozart et une véritable leçon
de direction de chœur offerte par Edouard Higginbottom.
Allons ! Même si de nos jours, pour avoir du
succès, il suffit de créer la surprise par son accoutrement,
sa présentation, des chants modernes et une sponsorisation, il
est réconfortant de constater - grâce à ce
DVD - qu'il existe encore de par le monde des ensembles d'enfants correctement
habillés, remarquables au point de vue musical, simples, respectueux
et heureux de chanter des oeuvres de compositeurs très anciens
comme Palestrina, Bach, Haendel ou plus récents comme Benjamin Britten
et bien d'autres.
La qualité des images est excellente et le son
également. On peut même pénétrer un peu plus dans
l'univers des "Wiener Sängerknaben" et leur magnifique
palais de Wien en Autriche. L'un de leurs solistes interprète
d'ailleurs spécialement le lieder "An die Musik" (À
la musique) de Franz Schubert avec une voix splendide. Ce DVD devrait
rendre d'innombrables services à tous ceux qui essaient de redonner
vie à un chant choral de grande qualité, malheureusement
sur le déclin dans notre pays. C'est une leçon pour tous.
Le DVD "L'or des anges" est uniquement disponible en Belgique
(info@kings-group.com) et en Allemagne (info@pascalmore.de).
Johannes-Passion (la "Passion selon Saint-Jean"
de J.S. Bach) : Production Deutsche Grammophon
GmbH (Hamburg) 2007 - Réf. DVD - 00440 073 4291 (avec
sous-titres en Français, Anglais, Espagnol et Chinois).
C'est la reprise en DVD de l'enregistrement réalisé
en juin 1985 dans la cathédrale de Graz, en
Autriche, avec son PCM-Stéréo converti par le studio
"Emil Berliner"
en son ambiophonique (mais uniquement en DTS 5.1).
Le Tölzer Knabenchor, les solistes et le Concentus Musicus
Wien avec ses instruments anciens sont placés
sous la direction de Nikolaus Harnoncourt.
Comme dans le cas du DVD "Weihnachtsoratorium"
cité supra, il s'agit d'un enregistrement que l'on peut
qualifier d'historique car il rompt totalement avec les interprétations
habituelles de cette Passion selon Saint-Jean. On pourra
d'ailleurs la comparer utilement avec celle du DVD du chœur du King's
College de Cambridge accompagné par l'orchestre d'instruments
anciens The Brandenburg Consort placés sous la direction
de Stephen Cleobury (Production "Brilliant Classic"). Le
temps d'exécution est presque identique (115 minutes pour le King's
College et 114 minutes pour le Tölzer Knabenchor). Mais Stephen Cleobury
dirige de façon traditionnelle alors que Nikolaus Harnoncourt
donne à cette exécution une vigueur peu commune, pleine de vie,
se rapprochant de l'opéra sans pour autant dénaturer l'œuvre.
Car il s'agit bien d'un drame en réalité. Les solistes enfants
ont des voix exceptionnelles, en particulier les deux altos dans l'aria
: "Von den Stricken meiner Sünden" de la première partie
et l'aria "Es ist vollbracht" de la deuxième partie. Il est
rare d'entendre une interprétation avec des voix d'enfants d'environ
15 ans qui descendent dans le grave avec une telle puissance et une telle
expression. On pourra aussi comparer dans les deux versions l'aria de la
basse "Mein teurer Heiland", avec le chœur en fond sonore, dont
la ligne mélodique apporte une sérénité apaisante
d'une grande beauté dans l'interprétation du King's College.
Au point de vue technique, les images sont très
belles et les couleurs un peu froides correspondent bien au climat
souhaité. La prise de son est parfaite avec seulement un regret
: c'est que les micros aient été placés un peu bas
devant les solistes enfants qui n'ont pas évidemment la puissance
vocale des adultes. Quand ils sont accompagnés par les "bois", on
perd très légèrement en définition et en niveau
par rapport à l'orchestre, d'autant plus que ces jeunes chanteurs
tiennent leur partition devant eux ce qui contribue à créer
un effet de masque. J'avais déjà constaté le même
phénomène, mais en plus important cette fois, sur l'une
des faces d'un Laser-Disc introuvable aujourd'hui des Wiener Sängerknaben
(Réf.
Philips 440 070 251-1). Sur cette première face, enregistrée
en 1989, les deux solistes enfants de la Missa Solemnis
(c-moll KV 139) de Mozart, placés à côté
du ténor Kurt Equiluz (que l'on retrouve sur le DVD de Graz dont
on vient de parler) et de la basse Ernst Jankowitsch, ont un niveau sonore
inférieur dans toutes leurs interventions. Ce qui les désavantage,
même si leur exécution est parfaite.
Alors que sur l'autre face, enregistrée en 1990
dans l'église Saint Stephan de Baden bei Wien, les très
belles voix des deux enfants (soprano et alto), qui interprètent
en duo le motet "Sub tuum praesidium" (KV 198 de Mozart), ont été
captées avec un niveau plus élevé par rapport à
l'orchestre dont il faut signaler que le premier violon, Werner Ink,
joue sur un Stradivarius.
On peut recommander sans réserve cette Johannes-Passion
de Johann Sebastian Bach dirigée par Nikolaus Harnoncourt
avec l'excellente basse Robert Holl déjà entendue
dans l'Oratorio de Noël présenté dans cette page.
Il n'est pas nécessaire de rassembler des formations chorales
et orchestrales importantes pour exécuter cette Passion.
Les enfants du Tölzer Knabenchor - qui doivent avoir entre
trente-cinq et quarante-cinq ans aujourd'hui - sont étonnants de
vérité et vivent littéralement ce qu'ils chantent
comme on peut le voir sur l'image. Il est vrai que la complicité
avec le maître de la musique baroque, Nikolaus Harnoncourt,
est présente à tous les instants par ses mimiques et
sa direction précise, créant ainsi un climat à nul
autre pareil. De plus, les musiciens du Concentus Musicus Wien jouent
sur des instruments anciens, dont une basse de viole à 7 cordes
pour accompagner notamment l'aria "Es ist Vollbracht", remarquablement
interprétée par le jeune soliste alto. Une merveille et
un grand moment d'émotion.
Petits virtuoses du bout du
monde
(un film de Karine Dusfour, d'après une idée d'Andrea Rawlings-Gaston
et Gaël Leiblang - Production Capa) :
Ce documentaire remarquable de 52 minutes a été
diffusé sur la chaîne France 3 le samedi 16 juin 2007.
Il retrace la recherche dans les cinq continents de 5 petits musiciens,
sélectionnés par Françoise Legrand, chef
d'orchestre française et fondatrice il y a vingt ans du "World
Philharmonic Orchestra" formé des meilleurs musiciens de
plus de 80 pays qui se réunissent plusieurs fois par an pour donner
des concerts destinés à aider les jeunes musiciens des pays
pauvres. C'est ainsi que l'on assiste dans le film aux auditions d'enfants
de 10 à 12 ans en Inde, en Thaïlande et en Tunisie
pour les violonistes, au Venezuela afin de trouver un(une)
altiste, et en Roumanie pour le violoncelliste. Attention,
Françoise Legrand précise bien - et on le constate
- que les auditions se font sans que les membres du jury puissent "voir"
les enfants. Car, explique-t-elle à juste raison, si l'un d'eux
a une "bonne bouille", cela peut fausser le jugement concernant
la valeur musicale captée par les oreilles.
On peut d'ailleurs faire soi-même cette expérience
facilement en écoutant d'abord le DVD d'un chœur d'enfants avec
l'image, et le même DVD sans l'image. Dans le deuxième cas,
on constate une modification immédiate de la perception sonore
et l'on découvre très vite d'autres qualités ou
au contraire des imperfections qui existent parfois, soit dans le rythme,
la justesse ou l'expression.
Françoise Legrand a une telle foi et un tel amour qu'elle renverserait
des montagnes. Et la bourse de 10 000 euros par an, offerte pendant
trois ans à chacun des enfants choisis pour qu'il puisse continuer
à perfectionner sa technique avec d'excellents professeurs, est
un rêve devenu réalité alors que certains d'entre
eux vivent parfois dans des conditions matérielles peu favorables
à l'apprentissage de la musique.
Ils sont donc tous venus à Paris en avion avec leur
maman ou leur papa recevoir leur prix mais aussi - et c'est extraordinaire
- un instrument de facture ancienne, valant plusieurs dizaines
de milliers d'euros ! Quand on voit les enfants, en particulier le violoncelliste,
entourer de leurs bras leur nouvel instrument, on ne peut qu'être
ému. Ce jeune violoncelliste roumain interprète à
12 ans dans ce documentaire un court extrait de la Gigue de
la Première suite pour violoncelle seul, en sol majeur,
de Johann Sebastian Bach, avec la maîtrise d'un professionnel.
Il aura certainement un bel avenir. D'ailleurs, Françoise Legrand
ne s'y est pas trompée puisqu'elle envisage de le présenter
plus tard au concours "Rostropovitch" qui est le concours
de violoncelle le plus difficile au monde.
Le concert qui a suivi a été donné
dans l'église Saint-Louis des Invalides à Paris.
Il a permis au jeune Roumain Andreï, à l'Indien Gavin,
au Thaïlandais Dong, au Tunisien Anès et
à l'altiste Vénézuélienne Alexia dont
la virtuosité est déjà grande, placés au
milieu des musiciens de l'orchestre, de jouer avec leurs nouveaux instruments
"La petite musique de nuit" (Eine Kleine Nachtmusik),
sérénade composée par Wolfgang Amadeus Mozart
le 10 août 1787 pour deux violons, alto, violoncelle et contrebasse
(K. 525). Magnifique encouragement pour ces enfants qui deviendront sans
doute les musiciens de demain.
Malheureusement, il semble que la musique classique
soit devenue aujourd'hui un vice honteux et répréhensible
puisque ce documentaire a été diffusé le samedi
16 juin de 23 h 15 à 00 h 07, heure à laquelle
les enfants de France ne risquent plus rien puisqu'ils sont endormis. La
rediffusion a été faite aussi le lundi 18 sur la même
chaîne, de 03 h 55 à 04 h 47, horaire rêvé
pour une "petite musique de nuit".
Avant le concert, l'un des enfants ayant demandé
à une musicienne professionnelle de l'orchestre "Comment
on peut être professionnel ?", celle-ci lui a répondu
très justement avec humour :
"Il y a trois solutions : tu travailles,
tu travailles,
et tu travailles.".
Je pense que si on lui avait demandé comment encourager
les enfants de France à faire de la musique classique, elle
aurait probablement répondu :
"Il y a trois solutions : diffuser un tel documentaire
à une heure de grande écoute,
diffuser un
tel documentaire à une heure de grande écoute,
et
diffuser un tel documentaire à une heure de grande écoute."
Carpe Diem... (Horace - Odes - An 8 avant J.C.).
Mstislav Rostropovitch (Les 6 Suites pour violoncelle
seul de Jean-Sébastien Bach) - 2 DVD d'une
durée totale de 240 minutes -
Production EMI Classics - édition spéciale
(PCM stéréo, Dolby digital, DTS surround).
Cet enregistrement est devenu un document historique
après le décès de Mstislav Rostropovitch
le 27 avril 2007, à l'âge de 80 ans. Et cela pour plusieurs
raisons :
- la première, c'est que ce très grand violoncelliste
présente en russe chacune des suites avant de les interpréter,
comme il l'aurait fait de façon amicale devant les étudiants
d'un conservatoire de musique (il existe un sous-titrage en plusieurs
langues) Il n'hésite pas à en tirer la philosophie,
à donner des exemples au piano et même à l'orgue en
se servant de celui de la Basilique romane de Vézelay où
l'enregistrement a été réalisé en 1991
alors qu'il allait avoir 64 ans (il était né dans une
famille juive de Bakou, en Azerbaïdjan, le 27 mars 1927).
Il avait en effet appris le piano avant de commencer l'étude du
violoncelle.
- la deuxième, c'est que Mstislav Rostropovitch s'est
réservé le droit (il était producteur délégué)
de décider du rythme du travail, de choisir et de conserver seulement
les prises qui lui convenaient (comme on l'indique dans la notice
des DVD). Le nombre des prises qui furent jetées à la
poubelle a été certainement important car il ne voulait
graver sur ces DVD qu'une interprétation des Suites se rapprochant
le plus possible de ce que Bach aurait peut-être souhaité entendre
quand il les a composées.
- la troisième, c'est l'endroit où fut réalisé
l'enregistrement effectué par les techniciens de Radio-France
: Rostropovitch, seul avec son violoncelle dans cette grande Basilique
de l'Yonne, assis sur une chaise placée à différents
endroits de la Basilique suivant les Suites, se trouvait dans un cadre
hors du temps. Précisons que le violoncelle est probablement celui
fabriqué en 1711 par Antonio Stradivari, appelé le
"Duport", du nom de son premier propriétaire.
- enfin, et c'est un argument plus "terre à terre" mais très
important pour permettre au plus grand nombre de découvrir à
la fois ces 6 Suites de Bach et ce grand Maître disparu
récemment, on trouve ces deux DVD dans un coffret vendu 9,99
€ dans une grande surface bien connue. Ce prix est étonnant
dans la mesure où l'on sait que les DVD de musique classique se
vendent en général entre 15 et 30 € l'unité.
Il est vrai qu'il s'agit ici d'une réédition de 1995, mais
bravo quand même !
On ne critique pas une telle interprétation
et je m'en garderai bien. Quand on l'écoute en PCM stéréo,
il m'a seulement semblé que certains "diminuendo" avaient
peut-être été "aidés au potentiomètre"
pendant le montage. Ce qui est plus gênant, c'est que ce montage
apparaît trop dans certaines Suites au cours d'un même
mouvement. En particulier dans la 2e Suite (par exemple
dans le Prélude et la Sarabande) dont
les prises de jour (les fenêtres laissent passer la lumière
du jour) et celles de nuit (les fenêtres à l'arrière
sont obscures) ont été intercalées les unes après
les autres. Cela se voit très bien à l'image (merci aux
fondus enchaînés...) mais heureusement on le perçoit
moins dans le "son" quand on écoute.On me dira que "le commun
des mortels ne s'en rendra pas compte" mais un tel monument musical
n'aurait pas dû être "monté" de cette façon
(je n'ose pas dire "masterisé" ou "remasterisé"
par respect pour la langue française... !).
Pour avoir assisté en 1963 à la prise
de son en stéréophonie de l'œuvre d'orgue de César
Franck sur l'orgue rénové de l'église Sainte-Clotilde
de Paris, je sais que les musiciens recherchent la perfection. Le maître
Jean Langlais s'est donc repris plusieurs fois au cours des enregistrements
qui avaient lieu pendant la nuit jusqu'au petit matin. Ce qui a posé
des problèmes à l'ingénieur du son Robert Lurie
au moment du montage. En effet, l'appareil utilisé à
l'époque était un magnétophone à 38 cm/s
dont la vitesse, entre le début des séances et la fin,
variait légèrement en raison de l'échauffement
des moteurs et des pièces en mouvement. C'était encore l'époque
des pionniers dans le domaine de l'enregistrement sonore. J'en ai parlé
dans l'un de mes livres.
Dans le cas des Suites pour violoncelle seul - et pour
respecter la "vérité" recherchée par les musiciens
quand il s'agit d'une telle œuvre - il aurait fallu effectuer les reprises
éventuelles la même nuit ou le même jour car dans un grand
édifice, l'influence de la température est importante
et il existe toujours une certaine agitation thermique naturelle de
l'air qui varie entre le jour et la nuit et change légèrement
la couleur sonore, surtout quand la disposition des micros a
été modifiée entre les différentes Suites
(ils ne sont plus à la même hauteur, l'un par rapport
à l'autre). On constate aussi que le niveau n'est pas toujours
identique ce qui nécessite des réajustements pendant l'écoute
des DVD. La prise de son est un travail d'orfèvre dont chaque petit
détail peut avoir de l'importance.
Il aurait été préférable
de conserver l'unité de lieu (les places respectives du musicien
et des micros) et de temps (soit le jour, soit la nuit) sans
changer les réglages mis au point à l'avance et bien équilibrés
afin de conserver la même couleur et la même
sonorité au violoncelle. La prise de son doit être
le miroir de la réalité et les 6 Suites de Bach
forment un "tout", même si elles sont très différentes
les unes des autres par leur caractère et leur tonalité.
Pour conserver la pureté d'une œuvre, c'est
l'artiste qui doit effectuer les diminuendo et les crescendo
(en un mot les nuances) qui feront revivre ce qu'a voulu
exprimer le compositeur ;
non un système électronique. Les appareils
d'enregistrement ne sont que des boîtes destinées à
mettre en mémoire le plus fidèlement possible ces
moments privilégiés et ils ne doivent pas façonner
les sons au gré du jour, de la nuit ou de l'oreille de ceux qui
contrôlent la qualité car la perception des êtres humains
peut varier assez vite après des écoutes prolongées
(surtout avec un casque... !). Aujourd'hui, on utilise trop facilement
les possibilités de montage et de trucage permises par les techniques
numériques, certes remarquables mais qui éliminent le côté
naturel et humain de l'exécution musicale
pour aboutir à un résultat n'existant pas dans la vie courante.
Il faut toujours penser qu'au temps de Bach, celui-ci et ses musiciens
ne pouvaient pas "truquer" leurs interprétations. Ce sont eux
qui détenaient la vérité sur la façon de
jouer dans la continuité les œuvres composées.
Néanmoins, ces deux DVD sont un témoignage
de la perfection d'exécution qu'exigeait pour lui-même
Mstislav Rostropovitch. Et la présentation faite avec simplicité
avant chacune des Suites est un véritable document pédagogique
qui ne peut que forcer l'admiration avec ses exemples concrets effectués
au piano ou à l'orgue pour expliquer l'utilité
des "points d'orgue", les "résolutions" qui suivent et les particularités
de composition des Suites de Bach. Ces deux DVD marqueront
donc l'année 2007, d'autant plus que la prise de son, écoutée
sans voir l'image, paraît meilleure (quoique inégale
à certains moments), ce qui correspond à la remarque
faite par le chef d'orchestre Françoise Legrand dans le film TV
"Petits virtuoses du bout du monde" (voir présentation
précédente). Regrettons seulement que dans le livret
de deux feuillets qui se trouve à l'intérieur du boîtier
on n'ait pas ajouté un troisième feuillet sur lequel l'ingénieur
du son de Radio France aurait pu parler des techniques employées
et des difficultés rencontrées qui furent probablement nombreuses.
On le fait trop rarement et c'est dommage car aujourd'hui, de plus en plus
de musiciens tiennent compte de la réalisation. D'ailleurs, quand
on veut devenir ingénieur du son à Radio France, ne faut-il
pas passer un examen très difficile pour lequel il est nécessaire
d'être aussi compétent en musique qu'en électronique
et en prise de son ?
Ces deux DVD et les deux remarquables CD
enregistrés en 1998 par le violoncelliste russe Boris
Pergamenschikow,dans le studio Teije van Geest de Heildelberg
en Allemagne, avec une technique de "haute fidélité",
resteront à mes oreilles - pour des raisons différentes
- deux références parmi les interprétations déjà
éditées des 6 Suites pour violoncelle seul de "notre
père le Bach".
Dans les deux cas, c'est de la belle ouvrage
!
Mozart : 3 concertos pour piano (n° 9 en mi bémol majeur
- K 271,
n° 12 en la majeur - K 414, n° 26 en ré majeur
- K 537, dit "du couronnement").
DVD de 95 minutes en stéréo, Dolby 5.1 et
DTS 5.1, produit en 2005 par EuroArts Music et Brilliant media
(Réf. 2010218).
Voici trois interprétations remarquables, enregistrées
à la perfection avec un juste rapport entre le piano et l'orchestre
dans les trois prises de son, bien qu'elles aient été
été effectuées dans des salles différentes
au cours de concerts publics. On reconnaît ici le professionnalisme
des techniciens de la firme EuroArts dont j'ai déjà
parlé supra.
Le Concerto n° 9 est surnommé parfois
"Jeunehomme" parce qu'il a été écrit par
Mozart en 1777, dans sa vingt et unième année, pour une
pianiste française Mademoiselle Jeunehomme. C'est dans la très
belle salle du "Mozarteum" de Salzburg, en Autriche, que
l'enregistrement a été réalisé avec la pianiste
japonaise Mitsuko Uchida, l'orchestre du Mozarteum étant
dirigé par Jeffrey Tate.
La très grande sensibilité
de Mitsuko Uchida apparaît immédiatement dans son
jeu, en particulier dans le deuxième mouvement (Andantino)
qui fait dire rien qu'en l'entendant "c'est du
Mozart..." ! Magnifique interprétation qui change de celles
d'autres interprètes, pourtant talentueux.
Le Concerto n° 12 en la majeur nous
transporte à l'époque de Mozart ! En effet, c'est le soliste,
Vladimir Ashkenazy, qui dirige le Royal Philharmonic Orchestra,
le concert ayant été enregistré dans la salle du
"Hampton Court Palace" de Londres, le 22 juin 1990.
Mozart jouait souvent ses Concertos en dirigeant lui-même
les musiciens et Vladimir Ashkenazy, par son amabilité
souriante, la précision de sa direction et la perfection de son
exécution, fait immédiatement penser à ce que devaient
être les concerts dans les grands salons des gens fortunés
du XVIIIe siècle. Ce Concerto n° 12 en est transfiguré
!
Enfin, le Concerto n° 26, surnommé
le "Concerto du Couronnement" parce que Mozart l'avait
joué le 15 octobre 1790 pour les fêtes du couronnement de
l'empereur Leopold II, a été composé en février
1788. Mozart espérait encore gagner un peu d'argent ou
obtenir une place lui permettant de vivre à l'abri du besoin. Ce
ne fut pas le cas et il mourut quelques années plus tard, dans la
misère, à 35 ans.
Le soliste Homero Francesch interprète magistralement
cette oeuvre magnifique, qui fut souvent jouée au XIXe
siècle. Homero Francesch possède une grande virtuosité
mais aussi une très grande sensibilité qui apparaît
bien dans le court "Larghetto" central d'une durée de 5 minutes,
suivi par le brillant "Allegretto" final de 11 minutes. L'enregistrement
a été fait dans la salle de concert "Christian-Zais-Saal"
de Wiesbaden, en Allemagne, avec l'orchestre de chambre "Deutsche
Kammerphilharmonie" dirigé par Gerd Albrecht. C'est
remarquable.
Ce DVD est à conseiller mais, dois-je le dire,
il ne m'a coûté que... 1 euro ! Et ce n'était
pas le premier jour des soldes dans ce magasin bien connu dont le sigle
n'a que 4 lettres. Il faut croire que le pauvre Wolfgang Amadeus Mozart,
mort le 5 décembre 1791 et mis en terre dans la fosse commune,
ne fait même plus recette aujourd'hui étant donné le
nombre d'acheteurs qui sont passés devant le présentoir où
se tenait cette merveille à 1 euro ! Je laisse aux Internautes
le soin de conclure...
Le piano oublié (un film de Henri
Helman, tourné en 2006, avec Jacques Perrin dans le rôle
de Benjamin et Corentin Martel dans le rôle de Julien)
:
Ce très beau film de 1 h 37, déjà
diffusé sur FR 3 le jeudi 12 avril 2007, a été
de nouveau programmé sur "TV5 Monde" le lundi 21 avril 2008.
Remarquablement interprété par Jacques Perrin et
le jeune Corentin Martel, il retrace l'histoire d'un enfant, Julien,
passionné par le piano mais dont le père, imprimeur, refuse
de voir son fils se consacrer à la musique. C'est donc sa femme
qui paie les leçons de piano pour que Julien puisse suivre les cours
de l'école de musique de la ville où ils habitent.
Un jour, en se promenant avec sa camarade d'école, il découvre
un piano à queue dans une grange abandonnée. Un homme
âgé, Benjamin, le surprend et il est étonné
quand Julien joue sur le piano à sa demande. Or, Benjamin
est un très grand pianiste, qui a été déporté
pendant la guerre sur la dénonciation d'un habitant du village...
Je ne dévoilerai pas la fin de ce film mais
il peut servir de base de discussion à de nombreux parents qui
n'encouragent pas toujours leurs enfants à poursuivre des études
musicales parce que dans le climat actuel de précarité
qui règne en France, jouer du piano "n'a jamais nourri son homme",
comme on le disait jadis. À moins d'être un musicien de très
haut niveau !
On pourra d'ailleurs rapprocher ce très beau document,
certes de fiction, de celui des "Petits virtuoses du bout du monde"
dont il a été question ci-dessus et qui montre la réalité
d'aujourd'hui.
Une leçon de musique
à la Villa Médicis (film de 55 minutes tourné par la
Télévision française en avril 1989, avec le
célèbre claveciniste Scott Ross et deux de
ses élèves de l'époque, devenus maintenant d'excellents
clavecinistes).
Ce document, diffusé plusieurs fois par la chaîne
ARTE en 2011, est très émouvant car Scott Ross est décédé
du SIDA dans sa maison d'ASSAS, le 13 juin 1989, un mois et demi après la fin du tournage à
Rome. Selon ses dernières volontés,
ses cendres ont été dispersées par un avion au-dessus
de ce petit village de l'Hérault. Pour ceux qui n'auraient pas
vu ce film au moment de sa diffusion, il existe maintenant un DVD vendu
dans le commerce.
Cet extraordinaire claveciniste était né en 1951 à
Pittsburgh en Pennsylvanie. Michel-E.
Proulx, facteur de clavecins dans
la ville de Québec au Canada, a eu l'occasion de rencontrer plusieurs
fois Scott-Ross. Il est vrai que depuis 1973, Scott-Ross avait enseigné pendant 13 ans le clavecin
à l'EMUL (École de Musique de l'Université
de Laval). Quand Michel-E.
Proulx apprit son décès
en France, il eut l'idée de rédiger sa biographie et d'en faire
un mémoire pour sa Maîtrise d'Histoire. Remarquable travail,
très documenté, réalisé d'après des
témoignages recueillis, que l'on peut consulter sur Internet :
Dans ce mémoire, Michel-E. Proulx raconte
qu'en 1971, après l'audition de Scott Ross qui s'était
présenté au célèbre
Concours de Clavecin de Bruges en
jeans, avec des cheveux longs et sans partition contrairement à
la coutume, un membre du jury s'est penché pour dire à son
voisin Kenneth Gilbert que Scott Ross "avait joué le
Prélude et Fugue en fa dièse majeur de J-S. Bach comme s'il
l'avait composé lui-même". Il obtint à l'unanimité
le premier prix qui, jusque-là, n'avait jamais été
décerné depuis que ce concours avait été créé.
Scott Ross laissera le souvenir du claveciniste le plus
authentique du vingtième siècle, celui qui a vraiment
compris comment on doit jouer et interpréter les oeuvres des musiciens
de la période baroque parce qu'il a lui-même souvent fréquenté
les facteurs de clavecins. Il est vrai que dans son enfance, il avait
mis des punaises sur les marteaux de son piano pour imiter le son du clavecin,
faute de pouvoir en acheter un ! Et les "Variations Goldberg"
(BWV 988), enregistrées à Ottawa en avril
1985 pendant un concert public donné dans le Pavillon Tabaret
de l'Université, est pour moi la meilleure version qui existe (clavecin
Yves Beaupré - CD Erato 3984-20972-2).
Merci à ARTE d'avoir eu le courage de
programmer de telles émissions musicales exceptionnelles à
des heures de grande écoute et de les rediffuser plusieurs fois
par la suite, le matin de bonne heure, pour ceux n'ayant pu être
présents lors de la première transmission en TNT. Et surtout
de continuer à le faire...!
à suivre...
© C. Gendre (6
mai 2012)
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