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Le son, cet inconnu...

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hydraule   Photo C. Gendre (collection du Musée suisse de l'orgue).
Reconstitution  de l'orgue hydraulique de Ctésibios, ingénieur ayant vécu à Alexandrie aux environs de l'an 246 avant J-C. Elle a été faite par Jean-Jacques Gramm d'après les plans d'Héron l'Ancien.

C'est probablement le premier instrument de ce type qui fut construit. Il fonctionnait avec de l'air qui était comprimé par de l'eau dans une cloche métallique. D'où le nom "d'Hydraule" qui lui fut donné (de hydôr : eau et aulos : tuyau). Cet air était envoyé dans les tuyaux quand on ouvrait les soupapes en pressant sur des touches rudimentaires en bois.

tuyaux
On distingue, au premier plan, les touches en bois. Derrière
chacune d'elles on trouve le tuyau correspondant. L'air, en
entrant dans le tuyau, produit un son puissant et agressif.
Photo C. Gendre (collection du Musée suisse de l'Orgue)

Au temps de Néron, cet instrument était utilisé pendant les
batailles et les jeux du cirque. Le son effrayait les soldats
ennemis et accompagnait les sacrifices des
chrétiens ou les combats des gladiateurs dans les arènes.
On peut le voir exposé dans l'une des salles du Musée suisse
de l'Orgue dont Jean-Jacques Gramm est le fondateur
et le conservateur. Il se trouve à Roche dans le canton de Vaud
(lien direct possible sur la page "Sites spécialisés").

Un son peut être créé par la vibration d'une colonne d'air,
d'une peau tendue, d'une corde, ou encore d'une lamelle
de roseau ou de métal. Dans le vide, la vitesse de propagation est nulle (on ne peut donc entendre aucun son). Dans l'air à 0°C, elle atteint 331,4 m/s alors que dans l'eau à 15°C, elle est de 1447 m/s. Le son se propage à 6000 m/s dans du bois de sapin (on peut faire l'expérience en grattant ou en frappant l'une des extrémités d'un tronc d'arbre pendant que quelqu'un d'autre écoute à l'autre extrémité).

anche
Photo C. Gendre
Voici deux tuyaux : celui du milieu, recouvert normalement par le pied qui se trouve à gauche, laisse apparaître l'anche avec la languette jaune qui est une lamelle de métal dont on peut raccourcir la partie vibrante grâce à la tige métallique appelée la rasette.
Du côté droit se trouve un tuyau de flûte avec l'ouverture appelée la bouche, qui ressemble à celle d'un sifflet.

flûte    Principe théorique simplifié du fonctionnement d'un tuyau d'orgue (flûte). Le jet d'air qui vient
de l'embouchure passe par la lumière et fait vibrer l'air contenu
dans  le  tuyau à une fréquence qui dépend de la longueur. Il se
produit toujours un ventre à l'extrémité avec un tuyau ouvert et
un noeud quand il est fermé (in : " Les synthétiseurs, une nouvelle
lutherie"de Claude Gendre (ouvrage publié aux Éditions Fréquences en
en 1985, aujourd'hui épuisé).

vibration
 Schéma tiré du livre "Les synthétiseurs, une nouvelle lutherie"
 déjà cité.

On peut représenter cette vibration par une courbe qui s'appelle une sinusoïde et qui a la forme ci-dessus pour un son pur comme celui
d'un tuyau de flûte. Le "ventre" correspond au niveau maximal
(positif ou négatif) et le "noeud" au niveau zéro. Dans un "cycle
par seconde" - on dit aujourd'hui un "hertz" - il y a donc deux
ventres. S'il s'agit d'une lame vibrante, cette dernière part du côté droit jusqu'à une position extrême, revient vers le milieu qu'elle dépasse et va du côté gauche jusqu'à une position symétrique, égale mais en sens inverse. Elle revient ensuite vers le milieu et le cycle recommence
(c'est le cas par exemple du diapason) avec néanmoins un amortissement à moins que la vibration ne soit entretenue.
Le nombre de hertz par seconde représente la fréquence du son.

L'oreille humaine commence à percevoir les sons à partir
de 20 hertz (c'est-à-dire 20 cycles par seconde). En dessous,
il s'agit d'infra-sons, inaudibles, mais que le corps ressent et
qui peuvent être dangereux à un niveau très élevé.
Par exemple, le bruit provoqué par le roulement
des camions sur une route pavée peut causer
des perturbations de l'audition et des troubles
psychologiques chez les riverains.

De même, l'oreille entend les sons jusqu'à 20 000 hertz - mais
pas au-dessus alors que les animaux et les insectes les perçoivent.
C'est la limite théorique chez les sujets jeunes mais dans la réalité,
de nombreux individus n'entendent plus les sons au-delà de 8 à
10 000 hertz s'ils sont âgés ou s'ils ont écouté de la musique
trop longtemps et trop souvent à un niveau élevé
(au-dessus de 90/100 dB).
L'oreille interne s'est peu à peu dégradée et c'est irréversible.
En 1999, on estimait à environ 30 % le nombre des
malentendants chez les jeunes.

En diffusant avec une puissance assez élevée, à partir d'un générateur, une fréquence d'environ 15 à 17 000 hertz dans une pièce où se trouvent des adultes, ces derniers - qui ne l'entendent pas réellement puisqu'elle se trouve pour certains un peu au-dessus du seuil de leurs possibilités auditives en raison de leur âge - sont néanmoins
gênés sans savoir pourquoi. Ils commencent à remuer et quittent assez vite la pièce sous un prétexte quelconque.
J'ai fait souvent cette expérience avec succès au cours
de mes conférences...

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Le son peut être dangereux à niveau élevé. D'ailleurs, nos
ancêtres de l'époque romaine utilisaient l'orgue hydraulique
de Ctésibios avec deux pompes pour augmenter la puissance
du son et effrayer un peu plus les gens... !
Ce n'est qu'à partir du dixième siècle après J.C. que l'orgue fut
utilisé pour les cérémonies religieuses dans le but inverse : faire
venir les fidèles dans les lieux du culte... !

orgue
Orgue de l'église de Bar-sur-Seine, dans l'Aube.
C'est un très bel instrument à trois claviers et pédalier
construit par le facteur François Mangin
entre 1734 et 1739.
(Photo C. Gendre)

Il est bien évident qu'un "tutti" sur un instrument possédant vingt-cinq, trente, quarante jeux ou plus, dont les rangées de tuyaux peuvent chanter ensemble, représente une puissance sonore importante, nécessaire dans un édifice de grandes dimensions.
Mais n'oublions pas qu'une seule fréquence à un niveau élevé peut
faire éclater un verre à condition qu'elle corresponde à sa fréquence de résonance.
Et le vent qui souffle dans les câbles d'un pont suspendu peut les faire entrer en vibrations jusqu'à ce que le pont se déforme et s'écroule. Ce phénomène a été filmé en Amérique et diffusé dans le monde entier
sur les chaînes de télévision. C'est d'ailleurs pourquoi une troupe
de soldats ne marche jamais au pas cadencé sur un pont car
le martèlement des souliers sur le tablier pourrait
également le faire entrer en résonance.

Le développement de l'électronique, après la découverte en 1905
de la diode par Sir J.A. Fleming et surtout de la triode par
Lee de Forest en 1907, a permis de créer artificiellement des sons
grâce à des circuits oscillants. On est arrivé à obtenir non seulement
la fréquence fondamentale (son pur) mais aussi les harmoniques
 pairs et impairs qui caractérisent le timbre selon leur rang.
En 1925, le russe Theremin réalisa un instrument avec deux
oscillateurs de fréquences élevées, donc inaudibles, dont le mélange
des fréquences provoquait une interférence audible. Il suffisait de modifier à la main la fréquence de l'un des deux pour obtenir
des notes (l'appareil fut appelé le Thereminvox).

schéma
Oscillateur de l'orgue Philicorda 22 GM de la
marque Philips (années 1980/1985), donné comme exemple
dans le livre "Les synthétiseurs une nouvelle lutherie" (déjà cité).
Le transistor est un BF 194. On voit au-dessus la forme du
signal de sortie qui correspond à une flûte (document Philips).

En 1928, l'ingénieur français Maurice Martenot reprit l'idée de Theremin pour construire les Ondes Martenot, instrument à clavier
dont la fréquence variable de l'un des oscillateurs était réglée pour obtenir les notes de la gamme habituelle, la modification des timbres étant obtenue grâce à des filtres.
Arthur Honegger utilisa les Ondes Martenot dans son oratorio
Jeanne au bûcher et André Jolivet composa un
concerto pour Ondes Martenot et orchestre.
C'est l'américain Olson qui réalisa avec la firme RCA le premier "synthétiseur" entre 1954 et 1959, suivi dès 1964 par Robert Moog
qui s'attacha plus particulièrement à créer un instrument
"pour les musiciens".

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Mais depuis toujours, les hommes ont cherché à conserver les sons. Une légende chinoise raconte même qu'il y a plus de 2000 ans, un chinois aurait enfermé dans une boîte un message verbal de son chef pour le porter à son empereur afin de lui annoncer la victoire sur les ennemis.
Au XVIe siècle, Rabelais, dans Pantagruel, imagina que l'on pourrait
faire "geler" les paroles : "Lors gelarent en l'aer les paroles et crys
des hommes et femmes... A ceste heure, la rigueur de l'hyver passée, advenante la sérénité et tempérie du beau temps, elles fondent et sont ouïes". Au milieu du XVIIesiècle, Cyrano de Bergerac, dans son livre "L'histoire comique des états et empires de la lune", parle d'une "boette magique, munie d'aiguilles, permettant d'entendre à volonté divers textes et musiques...".

phono
Phonographe à cylindre "Thomas Home Phonograph"
fabriqué par Edison dans les usines "West Orange"
entre 1896 et 1901. Son grand cornet servait à
amplifier les sons recueillis
par le diaphragme.
(Collection Jean-Jacques Gramm - Photo C. Gendre)

Depuis l'invention du Phonographe due à Charles Cros (qui en a eu l'idée en avril 1877) et à Thomas Edison (qui l'a effectivement réalisé en novembre de la même année), il n'a fallu qu'un siècle pour atteindre la perfection sonore telle que nous la connaissons aujourd'hui. Dans le pli cacheté déposé à l'Académie des Sciences, Charles Cros avait appelé son appareil le Paléophone = la voix du passé.

Il nous reste donc à découvrir l'histoire de la captation des sons.
Chose curieuse, elle est antérieure de deux siècles à celle du phonographe puisque c'est l'astronome et mathématicien anglais
Robert Hooke qui a réalisé, en 1667, un téléphone à ficelle permettant de transmettre la voix à distance bien qu'il n'ait pas eu à l'époque des pots de yaourt en matière plastique...
Faites l'expérience !

yaourt
(Photo C. Gendre)
Avec deux pots de yaourt (publicité involontaire et non payée...), une cordelette, quatre noeuds et deux points de colle, on peut faire un bon
téléphone (à condition que la ficelle soit bien tendue quand on parle dans
l'un des pots pendant que le correspondant met l'autre à son oreille...).
Remarque : il n'y a pas d'abonnement ni de supplément en cas de
dépassement d'horaire... !

© C. Gendre

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