Quelques Perles...
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Il est toujours intéressant de faire une halte quand on visite un site. Surtout si celui-ci est technique. Et la culture des perles peut
réjouir les connaisseurs et instruire les béotiens, car la
pédagogie de l'erreur existe.Un micro électrodynamique à pile...!
Un auteur, anonyme, a écrit il y a quelques années
dans une revue spécialisée
qu'un microphone électrodynamique reste un bon compromis
entre le micro dynamique et le micro électrostatique... !
Et que souvent, ces microphones sont alimentés à l'aide
d'une pile de 1,5 volt... !
On pourrait même, dit-il, remplacer la pile de
1,5 volt par une de 6 volts pour un "effet antiparasite
supérieur " (... ?) et une "sensibilité augmentée" (... !).
C'est étonnant ! Il n'y a pas d'erreur de composition puisque
dans un paragraphe précédent, l'auteur précise qu'il existe
trois types de microphones, "les microphones dynamiques,
électrodynamiques et électrostatiques".
Diable ! Il aurait fallu déposer un brevet...
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Micro dynamique Beyer. On voit la membrane
en forme de dôme et l'enroulement anti-ronflement dont
le fil est relié à la bobine mobile en opposition de phase.
(Photo C. Gendre)Première remarque (importante) :
On ne doit jamais brancher une pile aux bornes d'un microphone électrodynamique. En effet, dans ces micros, la sortie se fait sur un transformateur et celui-ci serait "magnétisé" par le courant continu.
C'est pour la même raison que dans les alimentations "Phantom"
des micros électrostatiques, les deux résistances déterminant le
point milieu du circuit doivent être obligatoirement égales à
moins de 0,4 % près (norme DIN 45 596), afin qu'aucun
courant continu ne puisse endommager des micros
dynamiques connectés sur les entrées prévues
quand il n'existe pas d'interrupteur pour
couper l'alimentation "Phantom".
Souhaitons à ceux qui viennent de lire ce texte de
ne pas avoir fait l'expérience citée plus haut... !Deuxième remarque :
L'appellation "dynamique" est l'abréviation de "électrodynamique", comme on dit "métro" à la place de "métropolitain" ; "électro" n'indique pas que l'on doive envoyer du courant dans le transducteur...!
C'est lui qui fournit une tension quand la bobine mobile solidaire de la membrane coupe les lignes de force de l'aimant sous
l'action des ondes sonores.
Il n'y a donc aucune différence entre un micro appelé "dynamique"
et un autre appelé "électrodynamique". Ils peuvent être soit à
bobine mobile et fonctionnent comme un haut-parleur à aimant permanent (mais en sens inverse), soit à ruban (dans ce cas,
le ruban correspond à un bobinage qui n'aurait qu'une spire).
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Micro à ruban Beyer.
Le ruban est tendu entre les deux aimants.
(Photo C. Gendre)Troisième remarque :
On ne voit pas bien comment des piles pourraient améliorer les performances d'un micro électrodynamique et créer un effet "anti-parasite" (mais quels parasites...?). Elles feraient plutôt
l'inverse.*****
Une bande magnétique à petits grains gloutons...
On lit parfois de drôles de choses au sujet de l'enregistrement magnétique. Et la croyance selon laquelle des "grains" placés sur
la bande "s'orienteraient" suivant la modulation n'est pas près
de s'éteindre puisqu'on retrouve parfois cette bonne histoire
dans des écrits dont la date de parution n'est pas le premier avril.
J'ai même lu que l'on doit orienter au préalable les grains métalliques
pour qu'une bande donne de bons résultats. Ce qui n'est pas faux.
Mais il n'aurait pas fallu ajouter : c'est la
polarisation haute-fréquence.Tout d'abord, il n'y a pas de "grains" sur une bande magnétique.
La couche est formée de cristaux aciculaires (en aiguilles) d'une
dimension inférieure au micron (environ 0,8 micron vers 1960
et même actuellement 0,2 à 0,3 micron de longueur).
Ces cristaux, mélangés à un "liant", sont effectivement "orientés"
au moment du couchage puisque la bande passe dans l'entrefer
d'un électro-aimant puissant afin que les aiguilles se placent
toutes les unes à côté des autres dans le même sens
(horizontal pour les bandes audio destinées
aux magnétophones à tête fixe).
Mais cela n'a rien à voir avec la polarisation.
On augmente ainsi la densité de la couche pour améliorer le niveau
et le rapport signal/bruit de fond (bandes high output et low-noise).
Au moment de cette orientation, le mélange
"liant + cristaux" est encore visqueux. Immédiatement après, la bande est séchée, le liant volatil s'évapore (il est récupéré) et les cristaux
restent collés définitivement au support (anciennement en acétate
de cellulose ou en polyvinyle, aujourd'hui en polyester ou en mylar).
Quand la bande magnétique est enregistrée sur un appareil, la tête magnétique aimante la couche d'oxyde et c'est cette aimantation
qui sera détectée par la tête de lecture pour la reproduction.
Il n'y a donc aucun déplacement physique de "grains"... !Ce qui vient d'être dit concerne les bandes ordinaires à oxyde de fer ou de chrome alors que les bandes spéciales, du type "métal évaporé", sont enduites sous vide par sublimation d'une couche de métal pur qui s'évapore et vient se coller sur le support en matière plastique
(polyester pré-étiré que la firme Dupont-de-Nemours
appelle "mylar" - c'est un nom déposé).
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Traces d'aimantation sur une bande magnétique
bi-piste (en analogique).
En haut, fréquence fixe (deux traits noirs correspondent à 1 hertz).
En bas, enregistrement de musique (les traits sont plus ou moins
rapprochés suivant les fréquences et plus ou moins noirs suivant le niveau).
Pour rendre visible cette aimantation, on a saupoudré la bande avec de la poudre de fer très fine qui s'est placée suivant les lignes de force.
En bas de la bande supérieure, on remarquera qu'à plusieurs endroits
des fragments de la couche d'oxyde ont été décollés du support.
(Photo C. Gendre - bande BASF des années soixante)La "polarisation" n'a aucun rapport avec l'orientation
des cristaux au couchage. Elle a été
mise au point en 1940 par deux ingénieurs allemands,
Walter Weber et Von Braunmühl.
Ce phénomène avait déjà été découvert en 1927 pour les
émissions hertziennes par deux américains,
Carlson et Carpenter.
La polarisation (on l'appelle aussi "prémagnétisation")
consiste à mélanger au courant modulé un courant
à haute fréquence, donc inaudible, afin d'amener la couche
magnétique à un certain niveau d'aimantation (hystérésis).
On se sert d'ailleurs du même courant à haute fréquence pour
effacer la bande grâce à une tête magnétique placée avant
la tête d'enregistrement.*****
Les bandes magnétiques s'effacent au bout de
dix ans...C'est ce que l'on m'avait écrit il y a quelques années
avant la sortie de mon livre
"Enregistrement et conservation des documents sonores"
(éditions Eyrolles).
On précisait d'ailleurs : "on m'a dit que...".
Il n'en est rien puisque sur le Compact Disc offert avec ce livre,
on trouve des enregistrements effectués il y a plus de 45 ans.
Certes, il ne faut pas conserver les bandes magnétiques à
proximité immédiate d'un gros aimant, d'un transformateur,
d'un haut-parleur ou d'une centrale électrique.
Mais placées dans leur emballage en carton et conservées
dans une armoire ordinaire se trouvant dans un appartement
normalement chauffé d'une région tempérée, les bandes
d'enregistrement sonore ne s'effacent pas au bout de 10 ans !
Il est peut-être possible, après 30 ou 40 ans, que le niveau
du signal diminue de 1 ou 2 dB. C'est insensible à l'oreille
et les appareils actuels, très supérieurs à ceux de l'époque
d'origine, permettent de compenser largement cet affaiblissement.Quant à l'usure mécanique, à condition d'avoir un appareil de reproduction en bon état, on peut passer une bande magnétique
sans problème plus de 500 fois. Curieusement, ce sont
les têtes qui s'usent et non les bandes...!
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Tête magnétique stéréophonique Revox à 2 pistes
dont on voit les bobinages. La largeur de l'entrefer a été
volontairement exagérée pour qu'on puisse la distinguer.
(Photo C. Gendre)Le problème est différent pour les bandes Vidéo dans la
mesure où les signaux sont plus faibles et lus par deux têtes
rotatives tournant à grande vitesse. Des cassettes datant de
vingt ans sont pourtant encore
parfaitement lisibles. En 1983, un essai de 250 passages
d'une cassette VHS de 2 heures a été effectué sur un
magnétoscope, avec un contrôle tous les cinquante passages.
La bande était encore utilisable
après 250 passages et on ne constatait pas de modification
notable de l'image avant 150 passages. Alors, avec
les bandes actuelles, jusqu'où ira-t-on ?
Cet essai a été publié dans une revue en 1988.*****
Il est néanmoins conseillé à ceux qui souhaitent conserver des enregistrements précieux de les recopier sur un CD-R bien que
l'on ne sache pas si la couche organique, gravée par les
appareils du commerce, résistera à l'usure du temps
puisque cette technique est récente.
On peut déjà constater, après deux ou trois ans, une
modification de la couleur de la partie active des
premiers CD-R.
Il existe en effet une différence entre les CD-R
et un CD fabriqué dans une presse de 60 tonnes,
les "pits" étant dans ce cas formés avec du
polycarbonate (makrolon) chauffé à 320 degrés.
Un risque potentiel de vieillissement existe mais avec
le laser, il n'y aura pas d'usure physique par
frottement puisqu'aucun contact mécanique ne se produit
au moment de la gravure et de la lecture.
Wait and see...!© C.GendreVers Réponses à vos questions < > Vers la Prise de son